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Le petit carnet de Maxence
19 avril 2008

Un Suédois à Versailles

Portrait_d_alexandre_Roslin_le_su_dois

Qui était Alexandre Roslin ?

Ce peintre suédois a pourtant passé la plus grande partie de sa carrière en France mais on le connait trop peu. Dans un de mes billets sur "l'éclat des perles dans la peinture" du 24 mars vous aviez pu découvrir une de ses toiles, celle de Sophie Jeanne Armande Elisabeth Septimanie Comtesse d'Egmont Pignatelli, cette dame toute de blanc vêtue et couverte de perles.

Copie_de_c_058

Alexandre Roslin dont la famille est originaire de Stockholm est né à Malmö le 15 juillet 1718. 
L'origine de son nom vient de son arrière-grand-père Bengt Mattson qui du fait de son métier d'interprète avait reçu le surnom de Ryssetolk. D'autre part l'appellation de Russie comme celle de Roslagen, région proche de Stockholm découle de la même racine. "Roselin" nom pris par la descendance découlait donc des talents russophones de cet arrière grand-père. Ce nom sera vite simplifié en Roslin. Le grand-père de l'artiste de perruquier devint échevin à Stockholm tandis que le père Hans Roslin était médecin.

Doué pour les arts, Alexandre fit ses apprentissages auprès du dessinateur de l'Amirauté Lars Ehrenbill, puis de 18 à 23 ans auprès du peintre de la Cour Georg Engelhard Schröder. En 1745 il sera nommé peintre de la Cour à Bayreuth chez le margrave Frédéric époux de Wilhelmine, soeur ainée de Louise-Ulrique de Suède.

Dès 1747 avec des économies en poche il file vers Venise, Ferrare, Bologne où il est élu membre de l'Académie des Beaux-Arts, Naples et Rome. Là, il peindra le portrait du marquis de l'Hôpital ambassadeur de France. La fille de Louis XV l'infante Louise-Elisabeth, duchesse de Parme et son époux Don Philippe de Bourbon admirent le portrait et aussitôt tombe la commande de peindre Don Philippe.

Mai 1752 Alexandre arrive à Paris et l'ambassadeur suédois de l'époque ainsi que son frère (les Scheffer) introduisent notre peintre dans la meilleure société et les cercles culturels. Cela ajouté à toutes les relations qu'il avait pu se faire en Italie voilà notre peintre fréquentant nos grands peintres français tels que Joseph-Marie Vien. Avec ce dernier son relationnel s'étend aux membres de l'Académie puis au comte Caylus, le baron Fredrik Sparre, Boucher, Tocqué, Pigalle et Cochin.

Alexandre voulait faire partie de l'Académie même si le fait d'être étranger et protestant étaient de lourds handicaps. A force de volonté, d'usage de son relationnel (dont le ministre des Affaires Etrangères en personne le marquis de Saint-Contest) et de commandes de portraits tels ceux de la jeune épouse de François Boucher, celle du sculpteur Claude-louis Vassé et la fille du peintre de cour Carle Vanloo, il est enfin agréé le  28 juillet 1753 !

Première commande de la cour en 1756 celle du petit-fils du Régent, Louis Philippe, duc d'Orléans. Un grand portrait sur un cheval gris lipizzan du duc de quoi occuper toute année en Etudes longues et pénibles! Notre beau peintre toujours célibataire rencontre à nouveau chez son ami Joseph-Marie Vien sa future épouse Marie-Suzanne Giroust, étudiante pastelliste chez Maurice Quentin de La Tour. A l'époque de son arrivée à Paris il avait bien fait sa connaissance mais les tuteurs et parents de cette jeune personne n'avaient pas voulu d'un peintre méconnu et peu argenté. Là, avec le relationnel du comte Caylus et celle du ministre de la Marine et de la Justice Nicolas-René Berryer il peut enfin épouser sa belle le 5 janvier 1759.
Pourquoi sa belle?
Mais parce qu'elle est ravissante comme vous avez pu le voir dans mon billet d'hier sur ce portrait "La Dame au voile" également intitulé "Une tête de femme ajustée à la bolonaise" de 1768 qui sera exposé l'année suivante au Salon en même temps que 17 autres toiles de Roslin. (Voile noir et éventail fermé, visage en partie caché, intime et inaccessible, séductrice et réservée, tout un charme dans l'oeuvre qui fera le succès de ce portraitiste)
Pendant les trois premières années du mariage naîtront 3 filles, puis trois fils dont le dernier l'année même du décès de Marie-Suzanne Giroust-Roslin en 1772 d'un cancer du sein. La descendance française du peintre viendra de son fils Alexandre-Antoine né en 1764.

Roslin travaille énormément tant avec la clientèle française qu'étrangère. En 1760 il réalise un portrait par mois. Il est enfin reconnu au point d'avoir de nombreuses commandes royales en 1764-1765. A la mort du peintre miniaturiste Jean Baptiste Massé en 1767 il est nommé conseiller à l'Académie. Le 1er septembre 1770 c'est au tour de l'épouse d'Alexandre Roslin d'être reçue membre de l'Académie.

Le même jour qu'Anne Vallayer-Coster !
(Vous savez : ma bannière et le tableau pour le cabinet de curiosité d'hier !)

1770 Roslin fut invité à faire une oeuvre historique pour le prince héritier Gustave de Suède et des portraits du prince Karl et du pince héritier Gustave de Suède qui séjournèrent à Paris.

A la mort de sa femme, Roslin peindra beaucoup moins et essentiellement des portraits de Gustave de Suède. En août 1773 il est élu membre de l'Académie Suédoise. Si par deux fois il avait refusé des invitations à se rendre en Russie et en Suède, là, plus rien ne le retient et l'été 1774 en compagnie de son domestique, Alexandre Roslin âgé de 56 ans part pour Stockholm. Il fera de nombreux portraits des membres de la famille royale, ceux de la famille Grill et celui de Mr l'Archiatre et Chevalier Carl von Linné le botaniste.

(souvenez-vous du billet sur la capucine avec Joseph Pitton de Tournefort dont les travaux servirent de base au botaniste suédois Carl von Linné au point,... qu'il lui dédiera un genre de la famille des Boraginaceae : Tournefortia. L'abbréviation Tourn. étant utilisée pour la dénomination des espèces qu'il a décrites.)

Avec moi on retombe toujours de la botanique à la peinture et de la peinture à la botanique !
Pour les gourmandes, je suis désolée, il faudra aller sur d'autres blogs !

Puisqu'on en parle autant vous présenter Carl von Linné peint par Roslin en 1774.

C_von_Linn_

Carl von Linné

Fin septembre 1775 Roslin arrive à St Petersbourg pour y faire le portrait de l'Impératrice. Pour ne vexer personne en Suède on présente cette halte russe comme faisant partie de son périple pour rejoindre Paris. En fait la Russie est très intéressante pécuniairement pour l'artiste puisque d'autres commandes privées s'associent à celle de la Grande Catherine. Il a tant de travail (75 portraits peints) qu'il ne peut satisfaire à toutes les demandes de grands personnages qui en prennent fortement ombrage. Aussitôt il demande à son ami Pierre directeur de l'Académie à Paris d'obtenir du roi français une lettre de rappel de façon à revenir en France l'honneur sauf.

Son retour passe par Varsovie et Vienne. Il aurait bien voulu peindre l'Impératrice Marie-Thérèse mais devra se contenter de ses filles la duchesse Marie-Amélie de Parme et la duchesse Marie-Christine de Saxe-Teschen et du prince Frans Joseph von und zu Liechtenstein.
Marie-Antoinette écrira à sa mère pour la prier d'accepter de poser pour Alexandre Roslin mais celle-ci par une lettre du 6 mars 1778 expliquera : "Elle (sa fille Marie-Christine) a posé quatre fois, chaque fois durant trois heures et le portrait n'est pourtant pas terminé. On n'ose pas bouger et on ne peut plus rien faire durant tout ce temps. Je n'ai pas le temps de perdre douze heures dans la semaine."

Avec la nomination du nouveau surintendant le comte d'Angiviller en 1774, il avait écrit pour dire combien il serait flatté de peindre Louis XVI. Pour rentrer plus vite à Paris il décline une importante commande du roi de Pologne Stanislas II Auguste. Nouvelle déception pour l'artiste son voeu ne put se réaliser dès son arrivée. Après quatre ans lorsque cela se produisit le roi ne voulut poser ad vivum. L'artiste refaisait avec le petit-fils l'expérience douloureuse qu'il avait eue de n'avoir le droit, en sa qualité de peintre de la Cour, de peindre un portrait officiel de Louis XV d'après le modèle vivant. Il n'en fut pas de même pour le reste de la famille royale. Il fit les portraits des comtes de Provence et d'Artois, de Madame Elisabeth, soeur du roi.

Une fois revenu à Paris Alexandre Roslin ne quitta la capitale que par deux fois. La première en juillet 1780 pour retrouver Gustave III à sa cure thermale de Spa et une autre fois en 1782 pour Bruxelles à l'invitation de la soeur de Marie-Antoinette c'est à dire l'Archiduchesse Marie-Christine pour peindre son époux gouverneur des Pays-Bas autrichiens, le duc Albert de Saxe-Teschen.
Les places de peintre étaient chères à Paris et Alexandre Roslin était également l'objet d'une cabale, aussi son séjour à Bruxelles fut-il des plus courts.

En 1784 lors d'une nouvelle visite à Paris de Gustave III, Alexandre Roslin propose son neveu Wertmüller pour peindre le portrait de Marie-Antoinette et de ses enfants. Le roi suédois imposera cette idée ce qui provoquera des réactions acerbes des autres peintres français contre Wertmüller.
Souffrant de toutes sortes de douleurs il consacrera les dix dernières années de sa vie à profiter de ses enfants et peindre les membres de sa nombreuse famille. Au Salon de 1787 il présentera les portraits de nombreux et austères fonctionnaires tous membres de la famille Nicolaï.

En 1789 alors que la révolution gronde il peint encore les portraits du préfet de la faculté de Médecine Jean-Baptiste-Eugénie Dumangin et du savant naturaliste Louis-Jean-marie Daubenton.
Pour avoir peint de nombreuses personnalités proches du pouvoir royal il s'inquiète et pense être poursuivi. Etonnamment il échappe aux persécutions et meurt le matin du 5 juillet 1793 à près de 75 ans. Il aura été un des peintres les plus fortunés du Paris du XVIII ème siècle.

Un mois après sa mort l'Académie Royale de Peinture et de Sculpture fermait ses portes.

Alexandrine_Elisabeth_Roslin_1771

Sa fille Alexandrine Elisabeth Roslin en 1771

 

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Commentaires
P
Merci pour ce post qui est, comme le disent les personnes avant ce commentaire, fort intéressant. <br /> <br /> Bravo, <br /> <br /> Paul<br /> http://romanderenart.canalblog.com/
C
et te dire que je reçois plus ren ! ren de ren !!! HEEEEEEEEEEEEEEEEEEELPEU !!!
B
je lis trop vite mes commentaires, je tape trop vite, donc on recommence :<br /> narrée avec un e<br /> et insufflez avec un Z. <br /> ah je file un mauvais coton moi ce soir...
B
L'histoire de l'art narrée par vous Maxence c'est que du bonheur. vous nous insuffler un peu de savoir, on lit et on relit et on admire, et on repart, en se disant : vivement son prochain post.<br /> <br /> Le reste.. vous le savez, et je vous en remercie.
L
delicieux, beaucoup de grâce dans ses peintures! J'espère retourner à Versailles chez mes BP prochainement pour visiter chateau et expo!
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